Entretien
Un nouveau procédé pour épurer le biogaz
Le carboséparateur développé par l’entreprise Gaz de ferme traite le biogaz pour obtenir du biométhane pur et du bioCO₂. Romain Casadebaig, cofondateur de la société, nous explique le procédé utilisé et ses vertus.
Qu’est-ce que le carboséparateur que vous avez développé et à qui est-il destiné ?
Le carboséparateur est un module d’épuration de biogaz afin d’extraire du biométhane pur (95 % de pureté, contre 50 à 60 % en sortie de digesteur) équivalant à la qualité du gaz de ville, et du bioCO₂. Deux produits qui peuvent être valorisés localement. Ce module est destiné à deux cibles : les agriculteurs qui ont une unité de méthanisation en cogénération, qui n’ont pas de solution d’épuration et qui souhaitent évoluer vers un autre modèle basé sur l’injection ou – et c’est davantage notre but – la valorisation hors réseau du biométhane. Notre deuxième cible concerne ceux qui ne produisaient pas de biogaz car ce n’était pas rentable pour eux, étant trop éloignés du réseau par exemple. Avec ce système, ils pourraient franchir le pas de la méthanisation en valorisant le biométhane localement, au plus près de la ressource, puisque sa qualité permet d’être un substitut aux hydrocarbures comme carburant ou combustible. Ainsi, ces agriculteurs pourraient également bénéficier du digestat comme fertilisant organique et aller vers plus d’autonomie. Nous nous intéressons d’abord à l’intérêt de l’agriculteur et à ses besoins : s’autofournir et/ou vendre à un tiers le biométhane.
Comment fonctionne-t-il ?
Le biogaz issu du digesteur traverse un filtre à charbon actif pour être séché et désulfuré. Le mélange de méthane et de dioxyde de carbone est ensuite douché à l’eau froide dans une colonne de 7 m de haut. Le CO₂ est ainsi piégé en bas, dans l’eau, avant d’être récupéré par un processus de dégazage. Le bioCO₂, dont les propriétés chimiques et physiques sont recherchées, est alors mis en bouteilles et valorisé auprès d’entreprises comme agent propulseur pour les tireuses à bière ou dans les extincteurs par exemple.
Le biométhane pur qui est en haut de la colonne est récupéré et valorisé localement : substitution au propane pour le chauffage et la cuisson, carburant pour des véhicules GNV (gaz naturel véhicules)… La technologie utilisée, qui est brevetée, est simple, économe et n’utilise pas de consommable ni de produit chimique.
Comment l’agriculteur accède-t-il à cette technologie ?
Pour éviter un surinvestissement en plus du digesteur, nous proposons un service à l’agriculteur. Nous installons le carboséparateur chez l’agriculteur qui le loue, et assurons l’entretien et le suivi. Ce dernier valorise le biométhane, ce qui permet de réduire les charges de l’exploitation ou de créer un nouveau revenu, à travers une station-service par exemple. Le bioCO₂ nécessite une filière de distribution spécifique assurée par Gaz de ferme, sauf si l’agriculteur a un débouché à proximité. Notre approche commerciale est souple et s’adapte aux besoins des agriculteurs. Depuis six ans, nous avons une installation pilote dans les Hautes-Pyrénées. Nous avons installé deux autres modules dans le Sud-Ouest, et nous prévoyons d’en installer une dizaine en 2023 afin de montrer que ce procédé lowtech fonctionne bien. Nous comptons également une centaine de commandes. Dans un deuxième temps, l’objectif sera de déployer ce carboséparateur à grande échelle en France et à l’étranger.