Le tour de la question
Un bel avenir pour le bois énergie
Depuis des millénaires, le bois énergie fait partie du mix énergétique des habitants de l’Hexagone. Selon l’association Solagro, la récolte de bois devrait augmenter fortement d’ici à 2050.
Dans la prospective Afterres 2050 Forêt et Bois que l’association Solagro a publiée en décembre 2023, la récolte de bois d’œuvre et de bois d’industrie augmente modérément entre la moyenne des prélèvements 2018-2021 et 2050, en réponse à l’évolution des besoins.
Le bois énergie, levier de l’adaptation des forêts
C’est la récolte de bois énergie qui augmente le plus significativement, avec + 50 % entre 2018-2021 et 2050. « La récolte de bois énergie et de bois d’industrie permet la valorisation de bois de moindre qualité. Elle apparaît ainsi comme un outil du gestionnaire forestier dans l’amélioration des peuplements, ainsi que comme un exutoire pour les bois dépérissants », souligne Florin Malafosse, auteur du rapport. La récolte de bois énergie représente ainsi un levier de l’adaptation des forêts au changement climatique.
En effet, la mortalité en forêt évaluée à 11,4 Mm³ en moyenne entre 2017 et 2021 « est susceptible d’augmenter fortement, voire de doubler » selon le scénario à 2050 de Solagro. Ces volumes, ainsi que des prélèvements sanitaires par anticipation et les travaux forestiers de création et d’entretien d’infrastructures de lutte contre l’incendie représentent la majeure partie de l’augmentation des prélèvements de bois énergie. « Le bois énergie est un outil financier pour faire des éclaircies en forêt », appuie Christine Deleuze, de l’Office national des forêts.
Valoriser les haies
Le linéaire de haies est également amené à doubler dans le scénario Afterres. Leur exploitation sous forme de bois énergie permet l’entretien de ces haies aux nombreuses fonctions agro-environnementales, et apporte un complément de revenu aux agriculteurs. « Les cultures ligneuses sans intrants sur les périmètres de captage permettent notamment de contribuer à la production d’une eau de qualité tout en conservant une valorisation économique des parcelles, précise Solagro. La collecte et la valorisation de bois de vignes et de vergers s’inscrivent également comme une alternative aux brûlages en bout de champs qui contribuent fortement aux émissions de particules. »
En complément, le scénario Afterres assure que le financement des services écosystémiques permettra de faire émerger des projets de production d’énergie qui ne seront pas exclusivement guidés par la rentabilité, mais qui seront aussi au service de l’amélioration écologique. « Cela implique d’encadrer la production de bois énergie en allant plus loin qu’une simple régulation par le marché, avertit Florin Malafosse dans son rapport. Si le signal prix, jusqu’ici, garantissait le plus souvent la hiérarchie des usages (la valorisation en matériaux étant toujours plus intéressante pour le propriétaire que la valorisation énergétique des bois récoltés), il est possible que ce contexte évolue avec l’augmentation des coûts des énergies fossiles, imposant des outils de régulation du marché. » Un encadrement de la production de bois énergie semble donc s’imposer à « une simple régulation par le marché » afin d’éviter des dérives de prix et de production.
Développement de la pyrogazéïfication
Pour rappel, le bois énergie reste de loin la première source d’énergie renouvelable en France. En 2022, il a représenté une production de 116 TWh, soit 32,9 % de la production primaire renouvelable (davantage que l’hydraulique et l’éolien réunis). Aujourd’hui, il est à plus de 95 % valorisé sous forme de chaleur directe (appareils de chauffage domestique, réseaux de chaleur urbains…) et très faiblement sous forme d’électricité. Dans le scénario Afterres, malgré une diminution des usages chaleur, les usages énergétiques se développent au fil du temps grâce à la pyrogazéïfication (procédé qui convertit du bois ou des déchets ligneux en méthane).
Les besoins en bois rond (bûches, plaquettes forestières) auront tendance à diminuer fortement pour des combustibles transformés (granulés) ou des systèmes moins exigeants en matière de qualité de combustibles (chaudières industrielles pyrogazéïfication de bois) susceptibles de valoriser des bois en fin de vie, des résidus de la filière ou des bois d’élagage. Ainsi, en 2050, l’ensemble de ces usages serait satisfait par une gamme très large de combustibles, et la part de sylviculture dédiée à l’énergie resterait, comme aujourd’hui, secondaire.