Le tour de la question
Rentabiliser un bâtiment agricole via un bail emphytéotique
Le bail emphytéotique permet de financer des projets de construction ou de rénovation de bâtiments agricoles, souvent trop lourds pour les agriculteurs. Il est signé par un propriétaire (l’agriculteur) et un preneur (un partenaire, gestionnaire de projet, etc.) qui peut alors installer et exploiter une toiture solaire contre le versement d’un loyer.
En signant un bail emphytéotique (voir encadré), un agriculteur peut construire ou rénover un bâtiment et louer sa toiture à une entreprise afin que celle-ci exploite une centrale photovoltaïque. Dans ce cas, l’agriculteur reste propriétaire du bâtiment neuf ou du bâtiment existant. Seule condition préalable : la toiture doit être en mesure d’intégrer des panneaux solaires. Pour cela, un bac acier 75 centièmes (0,75 mm d’épaisseur) est nécessaire, ainsi que des travaux de rénovation le cas échéant. Les descentes de charge doivent en effet supporter au minimum 23 kg par m2, ce qui correspond au poids du bac acier et des panneaux solaires. « Si l’agriculteur fournit ces attestations, une entreprise comme la nôtre peut louer la toiture du bâtiment en question, y compris une vieille toiture en amiante rénovée et y installer une centrale photovoltaïque. Le montant du loyer est quant à lui établi en fonction de la puissance installée en kWc. Nous menons des études technico-économiques au cas par cas, en regardant tout ce qui concerne le raccordement et la production d’électricité annuelle par rapport à la puissance installée, via des logiciels internes, ce qui nous permet de définir la rentabilité du projet. En fonction de ces calculs, nous versons un pourcentage du revenu dégagé par l’installation solaire à l’agriculteur. Ce montant est fixe. De son côté, la durée du bail emphytéotique est généralement de 30 ans. À la fin du bail, l’agriculteur a la possibilité de récupérer gratuitement la centrale solaire, mais celle-ci peut également être démantelée par le porteur de projet et partir en filière de recyclage », explique Cédric Maillet, animateur réseau chez Irisolaris, un producteur d’électricité spécialisé dans l’exploitation de toitures agricoles.
Une solution avantageuse
Pour les exploitants agricoles qui souhaitent investir dans les travaux de construction ou de rénovation, le bail emphytéotique est une solution très intéressante. Le loyer perçu permet en effet de financer en moyenne les deux tiers d’un bâtiment neuf (hors aménagement intérieur). Pour un bâtiment existant, le loyer offre à l’agriculteur la possibilité de changer une toiture en amiante par exemple, et de financer quasiment la totalité des travaux. En outre, le bail emphytéotique permet d’aider à financer ou rénover un bâtiment sans que l’agriculteur ne s’engage à investir dans une centrale photovoltaïque. « N’étant pas producteur d’électricité, celui-ci évite également les contraintes liées à la maintenance de la centrale, à la signature d’un contrat de revente de l’énergie avec EDF, etc. En tant qu’exploitant de la centrale, le preneur prend en charge tous ces aspects. Il investit lui-même dans la centrale solaire et installe celle-ci via un prestataire. De notre côté, nous sommes à la fois développeur et producteur d’électricité, ce qui permet à l’agriculteur d’avoir toujours le même interlocuteur », indique Cédric Maillet. En développement depuis une dizaine d’années en France, le bail emphytéotique est pourtant encore peu connu par les agriculteurs. Chez Irisolaris, qui exploite environ 1 300 centrales photovoltaïques installées sur des bâtiments agricoles, ce bail ne représente pour le moment que 15 à 20 % de l’activité, mais de plus en plus d’exploitants se montrent intéressés.
Les baux emphytéotiques
Le bail emphytéotique confère au locataire (également appelé emphytéote) un droit sur l’immobilier donné à bail par l’agriculteur propriétaire. En échange d’un loyer, le locataire est chargé de réaliser des améliorations dont il peut tirer profit sans avoir à rétribuer le propriétaire. En France, le bail emphytéotique avait originellement comme objectif de permettre aux propriétaires de grands domaines fonciers, généralement mal cultivés, de valoriser leurs terres sans avoir à mener eux-mêmes les travaux nécessaires.