Retour d'expérience
Prix de l’énergie : Saint-Sulpice-la-Forêt prévoit 40 % d’économies
Depuis 2016, la commune de Saint-Sulpice-la-Forêt, près de Rennes, fait appel à des capteurs connectés pour connaître, en temps réel, la consommation de ses bâtiments en eau, gaz et électricité, mais également pour piloter ses systèmes de chauffage. Une solution efficace et qui pourrait faire école dans d’autres communes rurales.
Saint-Sulpice-la-Forêt (Ille-et-Vilaine, près de 1 400 habitants) a commencé à réfléchir sur sa transition dès 2015. À l’époque, la mairie devait en effet faire face à une situation financière compliquée. « L’Alec [Agence locale de l’énergie et du climat, ndlr] nous avait annoncé une augmentation mécanique des coûts de l’énergie de 9 %. Par ailleurs, une fuite d’eau posait des problèmes dans la salle polyvalente et nous subissions une perte de production photovoltaïque », explique Yann Huaumé, maire de Saint-Sulpice-la-Forêt.
Une solution locale
Récemment élu, Yann Huaumé se rend compte que la commune manque d’informations pour mieux maîtriser ses consommations, mais les solutions disponibles sont alors bien trop chères. Heureusement, une start-up de la commune, spécialisée dans l’Internet des objets, développait au même moment une solution clé en main similaire, basée sur la technologie d’ondes radio LoRaWan (Long Range Wide Area, technologie qui permet de transmettre des données sur une plus grande portée que le Wi-Fi ou le Bluetooth, avec une consommation d’énergie très faible) et elle cherchait un espace de déploiement pour la tester.
Après s’être rencontrées, la mairie et l’entreprise ont donc décidé de se rapprocher de Rennes Métropole et du dispositif Rennes Saint-Malo Lab, un programme d’accompagnement dédié à l’expérimentation. Celui-ci a permis à un consortium (élus, entreprises, Métropole, Alec, etc.) de contracter et de se mettre d’accord sur un cahier des charges préfigurant une solution de télémesure énergétique des bâtiments communaux. « Nous avons également mis en avant plusieurs objectifs, notamment une réduction de 20 % de l’énergie consommée d’ici 2020, notre capacité à être souverains vis-à-vis des données, la réplicabilité du système, pour que d’autres communes rurales reprennent l’initiative, et le recours à des TPE-PME locales, souvent plus agiles que les grosses structures », indique Yann Huaumé.
Les données : un enjeu fondamental
Dans le cadre du programme Rennes Saint-Malo Lab, les PME du consortium ont obtenu 45 000 € d’avance pour développer la solution : un réseau de capteurs connectés via le réseau métropolitain LoRaWan et logiciel de suivi. De son côté, l’Alec s’est chargée de la pédagogie et de la formation des usagers des bâtiments, du personnel municipal et des habitants. Une fois la solution Smart Saint-Sulpice opérationnelle, en 2016, il a fallu six mois pour installer les capteurs sur six bâtiments et un an et demi pour codéfinir trois tableaux de bord.
L’un d’entre eux est réservé aux services techniques et porte sur les données de consommation des bâtiments, leur taux d’humidité, la production photovoltaïque, etc., avec des systèmes d’alerte en cas de surconsommation. Un autre, destiné aux élus, rassemble des données économiques et les niveaux de service, comme la température à l’ouverture et à la fermeture des bâtiments, par exemple. Enfin, un troisième tableau de bord est dédié au grand public. Il s’agit d’un portail permettant d’évaluer le projet et d’appliquer les bons gestes. « L’opération nous a permis de mieux comprendre l’inertie des bâtiments, de localiser et de réparer les fuites dans la journée (contre plusieurs mois auparavant), d’appliquer les bons réglages, de chauffer uniquement où et quand cela est nécessaire, etc. », précise Yann Huaumé.
Au bout de deux ans, Saint-Sulpice-la-Forêt a pu ainsi atteindre son objectif de 20 % d’économies d’énergie, uniquement grâce à l’acquisition de données et des mesures d’optimisation.
Pilotage des systèmes de chauffage
La commune s’est alors attaquée au pilotage de ses systèmes de chauffage. Pour cette deuxième phase, elle est sortie de l’expérimentation et a acheté une solution commerciale de télémesure via un marché public auquel ont répondu les PME du consortium et d’autres entreprises. « Nous y avons notamment greffé l’installation d’une solution GTB [gestion technique du bâtiment, ndlr] dans l’école, ainsi qu’une nouvelle expérimentation pour piloter quelques radiateurs avec la technologie LoRaWan », indique Yann Huaumé.
Saint-Sulpice-la-Forêt a ensuite mis en œuvre, en 2019, un plan pour rénover des bâtiments communaux et remplacer des préfabriqués énergivores. Celui-ci intégrait la construction d’un centre de loisirs, ainsi que l’extension d’une école à énergie positive et bas carbone. Les travaux seront terminés à l’été 2023. La commune espère quant à elle atteindre ainsi son prochain objectif, soit une réduction de 40 % des consommations d’ici 2024.
Le coût du suivi
Pour optimiser et rendre communicants ses anciens systèmes de chauffage, la commune n’a eu à débourser que 20 000 €. La deuxième phase (installation d’une solution commerciale de pilotage, changement de l’ensemble des tableaux électriques, etc.), elle, a nécessité un investissement de 170 000 €, subventionné à 70 % par la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Le budget du plan de rénovation et d’extension s’est quant à lui élevé à plus de 2,2 millions d’euros. Il a également été financé à 70 % par des aides publiques (État, Ademe, Rennes Métropole, Département, Région, etc.).