Retour d'expérience
Méthanisation : du CO₂ valorisé localement
Une unité de méthanisation et un système de liquéfaction du CO₂ ont été créés près de Nantes par des éleveurs et des maraîchers. Un partenariat gagnant-gagnant qui permet aux serristes de sécuriser une partie de l’approvisionnement en gaz à un prix stable et inférieur à celui du marché.
Éleveurs de vaches allaitantes et laitières et maraîchers-serristes se sont associés au sein de la SAS MéthaTreil pour monter une unité de méthanisation en injection (120 Nm3/h) à Machecoul (Loire-Atlantique). Les intrants de l’unité, mise en service en décembre 2019, proviennent à 60 % d’effluents d’élevage et à 40 % de déchets de légumes et d’ensilages de cultures intermédiaires et de maïs, pour un total d’environ 18 000 t/an. Les serres offrant un débouché local au CO₂ (favorisant la croissance des plantes), les agriculteurs ont également décidé de valoriser ce gaz*. C’était alors une première en France.
« Valoriser le CO₂ produit, c’est cohérent environnementalement, car on ne le rejette pas dans l’atmosphère. En plus, nous avions un débouché local, c’était donc une opportunité à saisir », estime Erwan Bocquier, éleveur et président de la SAS MéthaTreil. La liquéfaction du CO₂, avec le constructeur Verdemobil biogaz, a ainsi été opérationnelle en septembre 2020. Six millions d’euros ont été investis dans ce projet, dont un million pour la valorisation du CO₂, avec un retour sur investissement de neuf à dix ans. Après sa liquéfaction, le CO₂ est stocké dans une citerne verticale de 60 m³ avant son transport, une à deux fois par semaine par camion-citerne vers deux cuves relais près des serres, à 15 km de Machecoul. « Nous avons investi dans des cuves de stockage et dans un camion-citerne afin d’être totalement autonomes », souligne Erwan Bocquier.
20 % des besoins en CO₂ sécurisés
La production de CO₂, de 1 500 t/an, permet de répondre en partie aux besoins – qui s’élèvent à 7 000 t/an – du groupe Vinet Frères pour réguler l’atmosphère des serres maraîchères et favoriser la photosynthèse des plantes. Alors que les difficultés d’approvisionnement sont récurrentes dans un marché du CO₂ très saisonnier, le gaz issu de l’unité de méthanisation permet de s’approvisionner localement, avec un prix stable. L’éleveur précise que « la vente, équivalente au coût de production d’environ 100 €/t de CO₂, représente un gain pour la SAS ».
Pour le maraîcher-serriste, les avantages sont multiples : un prix stable et moindre que sur le marché. « Le marché du CO₂ suit l’offre et la demande et varie de 150 à 180 €/t, rappelle Erwan Bocquier. Par ailleurs, le recours au CO₂ produit par l’unité de méthanisation permet de sécuriser une partie de l’approvisionnement » et ainsi de moins dépendre des marchés extérieurs et donc de favoriser l’autonomie de l’exploitation.
Bien dimensionner l’installation
« Depuis que le système de liquéfaction du CO₂ est en marche, tout fonctionne bien », se réjouit l’éleveur, et si cela était à refaire, les associés « feraient la même chose ». Alors que les installations pour valoriser le CO₂ se développent au sein des unités de méthanisation, Erwan Bocquier conseille juste d’être « vigilant à la consommation d’électricité du système de liquéfaction en dimensionnant bien son installation au volume de gaz qui est produit ».
* Le biogaz est composé en moyenne de 55 % de méthane, 35 % de dioxyde de carbone (CO2) de vapeur d’eau et de sulfure d’hydrogène (H2S).