Stratégie
Les Hauts-de-France misent sur le biométhane injecté
La mission Rev3 entend faire des Hauts-de-France la première région d’Europe pour le biométhane injecté, une activité plus avantageuse pour les agriculteurs que la cogénération.
Depuis quelques années, les Hauts-de-France connaissent un fort développement du biométhane produit pour être injecté dans le réseau. Selon les chiffres du Panorama du gaz renouvelable 2020, publié en avril 2021, leur capacité maximale installée est passée de 341 GWh/an en 2019 à 607 GWh/an en 2020, faisant ainsi de la région la deuxième du classement français, derrière le Grand-Est. Pour la mission Rev3 (Rev3 pour Troisième révolution industrielle), le biométhane injecté constitue l’un des principaux axes de développement en matière de transition énergétique, d’autant que cette activité attire de plus en plus d’exploitants, très nombreux sur le territoire. Son ambition : faire des Hauts-de-France la première région française, voire européenne, en matière d’injection.
Avantage au biométhane injecté
« La cogénération est intéressante si l’on a besoin, sur le site de production, à la fois d’électricité et de chaleur. Or, dans les Hauts-de-France, les cultures n’ont pas une vocation énergétique, comme en Allemagne. Le modèle de méthanisation est davantage lié à l’économie circulaire. Il s’agit ici de valoriser des déchets agricoles, des déchets issus de l’agroalimentaire et des biodéchets. En outre, l’injection est avantageuse pour les agriculteurs en termes de revenus complémentaires. C’est un point essentiel compte tenu de leur situation financière. D’ailleurs, certains exploitants de la région commencent à diversifier leurs activités autour de l’injection, notamment en développant des projets de stations de ravitaillement pour les véhicules GNV », précisent Arnauld Etienne, référent méthanisation à la chambre d’agriculture des Hauts-de-France et Didier Copin, directeur de la mission Rev3 à la chambre de commerce et d’industrie de la région.
Afin de mettre en œuvre sa stratégie en matière de méthanisation, la mission Rev3 a créé dès 2014 le Corbi (Collectif régional biométhane injecté). Co-animé par GRDF et la Chambre de commerce et d’industrie, celui-ci rassemble l’Ademe, la chambre d’agriculture, le conseil régional ainsi que tous les acteurs de la filière. Pour faire émerger les projets et accompagner les agriculteurs, des groupes de travail ont été mis en place sur des thématiques telles que l’adhésion des parties prenantes (l’un des principaux freins aux nouvelles installations étant l’acceptation par les riverains), la formation et l’emploi, le plan d’approvisionnement et d’épandage ou encore le financement et l’assurance.
En outre, cette coordination permet de déployer les installations de manière équilibrée, ni trop proches, ni trop éloignées les unes des autres. Pour faciliter l’injection, les sites de production doivent également se trouver à proximité d’un réseau de distribution. Étant engagé lui-même dans une politique de transition énergétique, GRDF a beaucoup travaillé sur la densité du réseau. L’objectif, à terme, est d’avoir un réseau approvisionné en forte proportion par du biogaz. Or, l’injection permet largement d’y contribuer.
Baisse du tarif d’achat
Néanmoins, une incertitude plane, notamment vis-à-vis de la rémunération des agriculteurs. Dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie, un arrêté prévoit en effet une baisse dégressive du tarif de rachat pour les nouveaux contrats. Toutefois, celle-ci pourra être, du moins en partie, compensée dans le cadre d’une concertation en cours. Cette baisse pourrait ne pas trop impacter les agriculteurs : « Nous avions des tarifs d’achat du gaz déjà très intéressants. Ces derniers sont en train de diminuer, mais ils permettent toujours d’apporter un revenu supplémentaire aux agriculteurs. Par ailleurs, cela pousse les constructeurs à innover pour proposer des unités de méthanisation plus efficaces énergétiquement », explique Didier Copin. Une centaine de projets sont actuellement en attente de raccordement dans les Hauts-de-France, soit une capacité de 3 807 GWh.
Rev3
La troisième révolution industrielle est une dynamique initiée en 2013 par le conseil régional des Hauts-de-France et la chambre de commerce et d’industrie, sous l’impulsion de Philippe Vasseur, ancien ministre de l’Agriculture et président de la mission Rev3. Son but consiste à hisser la région à la pointe de la transition énergétique et de la transformation numérique. Plus de 1 300 projets sont actuellement estampillés Rev3, dans des domaines tels que la production d’énergies renouvelables, le stockage, l’efficacité énergétique, les réseaux intelligents et la mobilité.