Le tour de la question
Le dialogue territorial en pratique
« On n’a rien à perdre à dialoguer, on a tout à gagner. » Cette phrase d’Hubert Verbecke, éleveur dans le Nord, résume les enseignements donnés par le dialogue territorial testé dans les Hauts-de-France en 2019 avec le Centre ressource du développement durable (Cerdd).
Le dialogue territorial est une méthode qui favorise l’appropriation des projets de méthanisation par les riverains. Plusieurs exploitants agricoles porteurs de projets de méthanisation l’ont testé et approuvé.
« Quelqu’un qui n’a pas de réponse à ses questions peut se faire beaucoup de films, estime Hubert Verbecke, éleveur à Aix-en-Pévèle (Nord). En imaginant quelque chose qui ne correspond pas à la réalité, on peut perdre le dialogue avec cette personne. » Pour éviter d’en arriver là, lui et ses collègues ont rencontré leurs voisins, le maire, les conseillers municipaux, mais aussi les présidents d’associations locales, qui échangent avec beaucoup de monde, pour expliquer leur projet de méthanisation . « Leur accueil a été plutôt positif, car ils se sentaient pris en compte, écoutés et entendus. Je leur ai notamment demandé qu’ils renvoient vers moi les personnes qui venaient auprès d’eux parler de leurs craintes, se souvient-il. C’est vrai qu’en se mettant à leur place, on peut se demander ce que les riverains ont à gagner de ce projet… nous avons donc également discuté de la possibilité d’un financement participatif. »
Pour Viannez Petitprez, agriculteur à Bousbecque (Nord), il faut savoir « intégrer la critique, prendre du recul, et ne pas hésiter à interroger les gens pour connaître leurs craintes exactes afin de pouvoir y répondre ».
Organiser une visite
Un tournant dans l’avancée du projet et son acceptation auprès des riverains a également été la visite d’une unité en fonctionnement et celle du site où le projet allait s’implanter. « La première chose qu’on a faite, se souvient Pascal Delefortrie, agriculteur à Bousbecque, c’est d’inviter les riverains à visiter une unité de méthanisation pour bien se rendre compte de la réalité du terrain, et ne pas les laisser s’imaginer plein de choses. » Hubert Verbecke renchérit : « Les riverains se rendent ainsi compte de l’impact du projet, de sa hauteur, de ce qu’on met dans les digesteurs, de son fonctionnement. On a donné une image réelle de ce qui allait être à côté de chez eux. »
Se faire accompagner par un médiateur ou un animateur peut également être judicieux. Amélie Vieux, praticienne experte du dialogue territorial, a accompagné ces agriculteurs. « Le rôle du médiateur n’est pas de convaincre d’adhérer au projet, mais de créer les conditions du dialogue, précise-t-elle. Le porteur de projet doit avoir une posture d’écoute de ce que l’autre a à dire par rapport au projet, de ce qu’il vit, de la façon dont il le voit. Le projet peut être enrichi par toutes les parties prenantes pour qu’il convienne à tous. » Hubert Verbecke a fortement apprécié sa présence. « Lors de la visite du site, des personnes, qui n’osaient pas me parler directement, se sont rapprochées d’elle pour exprimer leurs craintes. Elle était là comme quelqu’un de neutre. » Sa présence a libéré la parole et sûrement évité des malentendus.
Six points clés pour ouvrir les échanges
- Apporter une information claire et faire en sorte que les habitants se renseignent directement auprès de vous, porteur de projet.
- Accueillir les questions sans vouloir convaincre.
- Proposer de visiter des unités de méthanisation similaires à votre projet.
- Créer une relation de confiance.
- Organiser la concertation, ne pas hésiter à se faire aider.
- Penser aux atouts pour le territoire : partenariats, gisements, financements participatifs…
Une vidéo du Cerdd rassemble plusieurs témoignages d’agriculteurs sur l’application du dialogue territorial et ses bienfaits