Le tour de la question
Label bas carbone : au cœur de la réduction des émissions de CO₂
L’agriculteur, en adoptant des pratiques vertueuses qui permettent de réduire ses émissions de CO₂, peut être rémunéré via le label bas carbone et via des primes filières.
Le label bas carbone a été créé fin 2018 par le ministère de la Transition énergétique afin de « récompenser les acteurs de la lutte contre le changement climatique ». En agriculture, l’idée est de réduire les émissions de gaz à effet de serre par des changements de pratique, mais également de séquestrer du carbone dans le sol.
Réduire les émissions
En grandes cultures, les trois leviers de réduction d’émissions portent sur un moindre recours aux engrais minéraux (fertilisation organique privilégiée, comme le fumier ou le digestat, et enfouissement des apports pour éviter la volatilisation des gaz dans l’atmosphère), la réduction de la consommation énergétique de l’exploitation (carburants, électricité…) et/ou la production d’énergie renouvelable (photovoltaïque pour l’autoconsommation, chaudière à biomasse pour les bâtiments…), et le stockage du carbone dans le sol. Ce dernier point est notamment permis par la réduction du travail du sol, la mise en place de couverts végétaux pour maximiser la production de matière sèche et l’introduction de légumineuses (fixatrices de l’azote de l’air) dans la rotation culturale.
Pour Pierre-Yves Hureau, ingénieur d’affaires chez Gaz Verts de GRDF en Normandie, « la méthanisation est un outil pour décarboner l’agriculture ». « Le digestat utilisé comme fertilisation organique des cultures permet de réduire le recours à des fertilisants minéraux de 30 à 50 % par an. Par ailleurs, la valorisation du biogaz comme carburant pour les tracteurs permet de réduire encore les émissions de CO₂. »
Des crédits carbone et des primes filières
S’il n’existe pas de cahier des charges précis, le projet de l’exploitant doit être labellisé par l’État. L’agriculteur devra utiliser un outil certifié label bas carbone pour valider la réduction des émissions (calculée en tonnage d’équivalent CO₂) grâce au changement de pratiques (généralement cinq ans après la date de notification). L’agriculteur peut ensuite être rémunéré par des entreprises inscrites comme financeurs dans le registre en ligne du ministère de la Transition énergétique. Elles doivent (obligation légale pour certaines sociétés) ou souhaitent compenser leurs émissions de CO₂ afin de contribuer à l’atténuation du changement climatique. La tonne de carbone stockée par hectare et par an est rémunérée à hauteur d’environ 30 à 40 €.
L’agriculteur peut également être rémunéré par l’intermédiaire de « primes filières » octroyées par des agro-industriels à des coopératives ou des négoces qui les restituent ensuite à l’exploitant. Par exemple, ce dernier s’engage à produire de l’orge en respectant certaines pratiques vertueuses (semis directs sans travail du sol, fertilisation minérale réduite, couverts végétaux entre les cultures…). Via la coopérative ou le négoce (qui aura au préalable validé par un outil certifié label bas carbone la réduction des émissions de GES), l’orge sera ensuite vendue à un agro-industriel, comme Heineken pour fabriquer de la bière par exemple, qui pourra alors justifier, contre paiement de primes, d’une réduction de ses émissions de carbone.