Stratégie
La micro-méthanisation, une solution pour les biodéchets urbains ?
Une expérimentation de micro-méthanisation de déchets organiques urbains a été lancée il y a quelques jours au CFPH d’Écully, aux portes de Lyon, dans le cadre de Decisive, un projet européen multidisciplinaire coordonné par l’Irstea.
Le projet Decisive part du constat que les biodéchets représentent 14 à 47 % des déchets urbains en Europe et sont en général gérés globalement, alors qu’ils pourraient constituer un circuit autonome de recyclage, retournant au producteur, notamment via le compostage dans les jardins partagés ou appartenant à la collectivité. Il propose pour cela de changer d’échelle et de raisonner par quartier ou même par immeuble pour trouver des solutions de collecte, de préparation et de valorisation à taille humaine : compostage, mais aussi méthanisation.
Boucler la boucle des nutriments
« Un méthaniseur demande d’importants investissements et n’est donc pas adapté à de petites productions », explique Alain Grenet, chargé de mission expérimentation à l’Établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole, dont dépend le Centre de formation et de promotion horticole (CFPH). « Le projet a l’intérêt pour nous de vérifier la faisabilité d’un méthaniseur de taille réduite. Nous sommes en contact avec des producteurs de déchets verts, comme les paysagistes, en même temps que des horticulteurs et maraîchers à la recherche de fertilisants, mais aussi des restaurateurs qui se fournissent dans notre ferme urbaine et y rapportent leurs déchets organiques. Cela nous intéresse de boucler la boucle des nutriments en local via les déchets urbains. Nous allons pouvoir vérifier si l’échelle est pertinente, éprouver le comportement des producteurs de biodéchets, l’impact environnemental de ce type de solution locale par rapport aux grosses unités, etc. »
Avec une production de gaz de 20 m3/jour et 1 à 2 kWh en cogénération, soit à peu près la consommation ménagère d’une famille d’agriculteurs, le micro-méthaniseur n’est pas à proprement parler un gros producteur d’énergie renouvelable, mais il réutilise in situ ou presque des ressources pour l’instant incinérées dans des conditions peu satisfaisantes pour la lutte contre le changement climatique. Le projet prévoit également de tester la fabrication d’un pesticide à partir de digestat, autre solution plus économe en énergie et ressources carbonées.
Détourner les biodéchets urbains de l’incinération
Les résultats pourront intéresser les agriculteurs à la recherche d’une solution locale pour valoriser leurs biodéchets, mais aussi les producteurs de biodéchets urbains ou périurbains, paysagistes, restaurateurs ou collectivités locales, à l’image de la Métropole de Lyon qui aimerait détourner au plus vite de l’incinération environ 6 000 tonnes annuelles de déchets ménagers organiques.
Un projet multidisciplinaire européen
Lancé en 2016, le projet Decisive, financé par aux deux tiers par l’Union européenne dans le cadre du programme Horizon 2020, rassemble autour de la gestion des déchets organiques urbains un consortium de 14 partenaires basés en France, en Espagne et en Italie, où un second site de démonstration sera installé dans quelques mois. Il est coordonné par Irstea (Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture). www.decisive2020.eu