Le tour de la question
Exploiter les friches industrielles pour produire des énergies renouvelables
Une étude de l’Ademe confirme l’intérêt que présentent les friches industrielles pour l’installation de parcs photovoltaïques. Elles pourraient accueillir rapidement une puissance de 18 GW.
En 2019, l’Ademe avait publié une première étude nationale consacrée au potentiel des friches industrielles pour la production d’énergie photovoltaïque (disponible ici). Cette dernière demande en effet davantage d’emprise au sol que l’éolien. À l’époque, l’Ademe tablait ainsi sur un potentiel de 49 GW pour les friches industrielles, mais cette estimation était basée sur un nombre limité de critères excluants (en lien avec l’environnement et l’urbanisme). En outre, l’Ademe n’avait pas la possibilité de mener une investigation particulière pour consolider l’état réel de chaque terrain. Par ailleurs, une étude nationale ne pouvait pas anticiper d’éventuels conflits d’usage vis-à-vis de la reconversion des friches et le risque de compétition entre différents projets.
Problème : le sujet est rapidement devenu, depuis la première étude, un enjeu majeur pour la filière photovoltaïque, les friches permettant notamment d’éviter le recours à des Enaf (espaces naturels, agricoles et forestiers). « Lorsque l’étude a été menée, la raréfaction du foncier n’était pas encore un sujet pour les développeurs, mais une fois les résultats publiés, la situation avait changé. Les développeurs, ainsi que les régions, souhaitaient connaître les sites potentiels afin d’initier des projets », explique Pierre Rale, ingénieur filière photovoltaïque à l’Ademe.
Un potentiel de 18 GW
Pour l’Ademe, il était impératif d’aller plus loin dans le recensement des friches industrielles, avec plus de critères excluants, mais aussi avec le concours des services instructeurs pour prendre en compte les différents contextes et les orientations en matière de reconversion des friches. Une seconde étude, plus exigeante, a donc été menée en 2021 en intégrant les critères technico-économiques et environnementaux les plus complets possibles. Toutefois, cette étude n’est pas publique, elle est destinée aux services instructeurs de l’État, au ministère de la Transition écologique et aux collectivités territoriales. Les critères retenus concernent notamment des surfaces d’au moins 1,5 hectare pour chaque terrain et une puissance minimale de 1 MW pour les futurs parcs photovoltaïques. Cette nouvelle étude visait également à identifier 20 sites par département sans enjeu, ni conflit d’usage. Les résultats ont été présentés en mars dernier.
« Le but consistait à montrer qu’il existe un réel potentiel photovoltaïque, avec des sites très favorables pour accueillir des centrales au sol et affichant une bonne rentabilité. Nous avons ainsi recensé environ 18 GW potentiels, mais des études d’impact devront être réalisées au préalable. Il s’agit avant tout d’un état des lieux, d’une idée de la production envisageable et non d’un inventaire exhaustif », indique Pierre Rale. Pour consolider les données de la première étude et vérifier l’état des friches, l’Ademe a notamment réalisé une analyse par photo-interprétation (via des applications telles que Google Streetview et des outils spécifiques) dans le but de détecter une éventuelle activité. Elle a également mené tout un travail de recoupement des données avec des documents administratifs.
Impliquer les territoires
En termes de modèle économique, l’étude s’est focalisée sur un cadre classique dans lequel un développeur viendrait installer seul un parc, avec le concours des collectivités. L’étude s’inscrit en effet dans une logique de massification du photovoltaïque. Les sites identifiés permettent donc un déploiement rapide, avec un réel impact sur la production d’énergie, mais selon l’Ademe, les citoyens devront, eux aussi, être impliqués dans les projets le plus tôt possible. « Si un élu local souhaite installer une centrale, il devra identifier quelques sites en friche et éventuellement un développeur. Ensuite, une consultation citoyenne pourra par exemple être mise en place afin de déterminer un emplacement », précise Pierre Rale.
Reste que l’actualisation des terrains en friche est très complexe et requiert la mise en œuvre de moyens humains. « Par exemple, des sites peuvent être reconvertis, sans être supprimés des listes de sites en friche, et inversement. Si l’on souhaite être performant sur ce sujet, il faudra gérer la base de données en continu, et idéalement, territoire par territoire (voir encadré, ndlr) », conclut Pierre Rale.
Accompagner les collectivités
L’Ademe déploie un réseau de conseillers en énergies renouvelables à destination des collectivités territoriales, premiers destinataires de l’étude. Baptisé Réseau des générateurs (cf rubrique initiative, CTE territoires, mois de septembre), il a pour but d’accompagner les collectivités dans leur transition, notamment pour mettre en place une politique de gestion des friches industrielles au profit des énergies renouvelables.