Stratégie
Développer les filières de matériaux biosourcés
La construction à partir de matériaux issus des cultures de chanvre, lin, miscanthus, de paille ou de bois se développe en Île-de-France alors que la ressource n’est pas forcément francilienne. Une étude fait le point sur les bénéfices de ces cultures afin de développer des filières de valorisation dans la région.
L’énergie « grise », nécessaire à la fabrication, au transport et à l’élimination des matériaux de construction, peut représenter 50 % de l’énergie totale consommée par un bâtiment sur 40 ans, selon l’association Écoconso. L’institut Paris Région Île-de-France a publié une étude en avril 2023 sur les matériaux biosourcés issus des cultures de chanvre, lin, paille, bois, miscanthus afin de réduire cette part d’énergie grise.
Promouvoir les matériaux biosourcés
En effet, la construction à partir de matériaux biosourcés se développe (isolation bottes de paille, béton de chanvre, etc.) en Île-de-France, portée par une réglementation favorable. Néanmoins, si « les filières de matériaux ou produits biosourcés existent dans la région, elles sont encore économiquement fragiles et peinent à trouver un débouché sur le marché francilien », soulignent les autrices Marie Carles et Julie Missonnier. L’objectif de cette étude, qui démontre les avantages agronomiques et environnementaux des principales cultures concernées, est de les faire connaître et de promouvoir leur développement à l’échelle régionale.
La paille, principalement issue du blé, de l’orge et du triticale, est présente en abondance sur le territoire. « Sa valorisation sous forme de matériau de construction est intéressante économiquement et la vente directe est le principal mode de commercialisation, précisent les autrices. Des regroupements d’agriculteurs qui vendent la paille comme matériau de construction émergent en Normandie notamment, permettant une massification de l’offre. » Néanmoins, cette disponibilité évolue selon les autres usages, tels que le retour au sol pour maintenir le taux de matière organique et donc la fertilité, les litières en élevage, la méthanisation…
Engouement pour le lin
Le lin et le chanvre permettent de diversifier les cultures de l’assolement, et donc d’allonger les rotations, ce qui facilite la gestion des adventices et contribue à améliorer la vie du sol. Peu gourmandes en intrants, ces cultures sont intéressantes d’un point de vue environnemental. Elles demandent néanmoins de la technicité de la part de l’agriculteur et nécessitent une unité de transformation à proximité pour leur valorisation. D’un point de vue économique, si la marge du chanvre s’avère contenue, celle du lin offre une haute valeur ajoutée. « L’évolution de la surface du lin en Île-de-France, en hausse de 53 % entre 2017 et 2020, montre un véritable engouement pour cette culture », révèle l’étude.
Comme pour le lin et le chanvre, le développement du miscanthus dépend de la possibilité de regroupement d’agriculteurs autour de projets communs, portés par eux-mêmes pour garantir leur réussite, afin de développer des filières de valorisation en matériaux biosourcés. « Si des débouchés à plus haute valeur ajoutée que le paillis ou la litière sont visés, la proximité avec un transformateur semble également intéressante », note l’étude. Côté agronomique, cette plante pérenne, qui reste sur une parcelle pendant une vingtaine d’années, rebute certains agriculteurs. Pourtant, elle peut justement valoriser des parcelles peu fertiles, mal situées ou très petites. Des débouchés prometteurs sont observés en chimie verte, avec une meilleure valeur ajoutée que pour les débouchés classiques de paillis ou de litière.
Surfaces cultivées en Île-de-France
En Île-de-France, le potentiel de production de paille mobilisable pour différentes valorisations autres qu’agronomiques (élevage, matière ou énergie) s’établit entre 280 000 et 750 000 tonnes par an environ (pour 312 000 ha cultivées). La région compte actuellement environ 2 000 ha de chanvre, 3 000 ha de lin, et 400 ha de miscanthus.