Décryptage
Cultures intermédiaires à vocation énergétique : c’est quoi ? Ça sert à quoi ?
D’été ou d’hiver, ces cultures ont à la fois un pouvoir méthanogène et des intérêts agronomiques et environnementaux. Explications.
Les cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE), c’est quoi ?
Ce sont des cultures implantées entre deux cultures alimentaires. « Il en existe deux types. Celles d’été, des espèces rustiques qui doivent lever rapidement en période sèche, comme le tournesol, le sorgho, ou encore certains maïs. En général, elles sont implantées en juillet et récoltées avant les premières gelées, en octobre. Et celles d’hiver, semées en septembre et récoltées au printemps suivant, telles que les graminées, le triticale ou l’avoine », développe Julien Thual, ingénieur et référent méthanisation à l’Ademe.
À quoi servent-elles ?
L’intérêt est divers. « Les Cive, notamment celles d’hiver, assurent un couvert végétal et remplissent le rôle des Cipan, les cultures intermédiaires pièges à nitrates, en pompant les nitrates et en limitant ainsi le risque de lessivage », précise Adeline Haumont, chargée de mission biogaz à l’Aile, agence locale de l’énergie en Bretagne et Pays de la Loire. Elles permettent aussi de limiter l’érosion des sols et la pousse des adventices. Les travaux menés par Arvalis, via entre autres le projet Opticive, montrent que le carbone organique restitué au sol à la suite d’une Cive est au moins équivalent à la biomasse restituée par la destruction d’une Cipan.
Et bien sûr, elles alimentent le méthaniseur, « avec un potentiel méthanogène deux à trois fois plus important que le fumier bovin, si l’on ramène à la tonne », souligne Adeline Haumont. Elles permettent aussi à l’agriculteur d’avoir du stock, puisque des Cive récoltées et ensilées peuvent se conserver un ou deux ans avant de passer dans le méthaniseur.
Dans quels systèmes sont-elles utilisées ?
Il n’y a pas de chiffres nationaux sur les parts d’approvisionnement des méthaniseurs en service, mais les Cive sont davantage utilisées dans les systèmes en injection, notamment parce qu’elles sont comptabilisées dans la prime aux intrants contrairement au tarif en cogénération. On trouve aussi, de fait, plus d’approvisionnements en Cive dans les installations des céréaliers.
Quels rendements ?
Dans son guide Réaliser une unité de méthanisation à la ferme, l’Ademe indique que si les rendements peuvent varier selon les conditions climatiques, « il faut néanmoins viser un objectif minimal de 4 tonnes de matière sèche (tMS) par hectare pour rentabiliser les coûts d’implantation et de récolte. Dans de bonnes conditions, on pourra récolter 6 à 7 tMS/ha en moyenne ».
Quels sont les inconvénients ?
« La conduite des Cive est délicate, le risque est de ne pas réussir la levée et ne pas obtenir la biomasse espérée », poursuit Julien Thual. Par ailleurs, certains craignent la substitution de cultures alimentaires au profit des Cive. « Il ne faut bien sûr pas tomber dans le tout culture énergétique. Le risque serait, pour la filière, de déployer ce gisement facile avant celui des effluents d’élevage. Aujourd’hui, lors de l’attribution des aides aux projets, le recours aux Cive est parfois limité, parfois libre. Cela dépend des contextes géographiques et agricoles régionaux. »