Le tour de la question
Rénovation des bâtiments dans les collectivités : comment trouver du personnel ?
Dans une étude, l’association européenne des autorités locales en transition énergétique, Energy Cities, s’est penchée sur les difficultés rencontrées par les villes pour recruter du personnel leur permettant de décarboner les bâtiments. Elle fait également un certain nombre de recommandations.
Energy Cities discute constamment avec ses membres, des villes situées un peu partout en Europe et notamment en France, sur les questions en lien avec la transition énergétique, en particulier la rénovation des bâtiments et la transition des systèmes de chaleur. Ceux-ci lui ont exprimé les obstacles rencontrés, à commencer par le manque de personnel qualifié pour définir une planification énergétique, mettre en place des projets, ou encore discuter avec les citoyens et les entreprises. Afin de définir le nombre de postes nécessaires à l’échelle nationale et européenne, Energy Cities a donc mené une étude baptisée Les capacités humaines des collectivités locales : le point de blocage de la décarbonation des bâtiments. Selon cette étude, publiée en avril 2022, 15 768 postes à temps plein devraient être pourvus dans les municipalités françaises, entre 2022 et 2030, uniquement pour le bâtiment.
Toutefois, le recrutement de personnel qualifié est très difficile. Outre un manque de formation, il existe une forte compétition entre le secteur public et le secteur privé. « On constate une fuite des cerveaux vers des bureaux d’études par exemple. Cela s’explique en partie par le fait que l’administration publique souffre d’une mauvaise image en matière de conditions de travail. Il s’agit pourtant de postes très intéressants, mais il est impératif de les valoriser », explique Mélanie Bourgeois, co-autrice de l’étude. Par ailleurs, le recrutement souffre d’un manque de moyens financiers. Les collectivités ont bien la possibilité de demander des fonds, européens notamment, mais elles n’ont généralement pas le temps de s’en occuper. Or, avec la baisse de leurs dotations, elles se retrouvent souvent bloquées. L’étude pointe également un frein culturel. En France, le recrutement de personnel dans les municipalités n’est en effet pas considéré comme un investissement, mais davantage comme une dépense.
Les solutions préconisées
Pour inverser la tendance, l’étude recommande un changement de philosophie au niveau des collectivités. Celles-ci doivent penser le recrutement comme un investissement pour le futur, d’autant plus qu’il s’agit d’un investissement très rentable. « Derrière, les municipalités peuvent faire des économies d’énergie, mais également créer des emplois. Ces derniers sont en lien direct avec les activités que peuvent développer les personnes qui vont travailler à la transition d’un territoire », précise Mélanie Bourgeois.
En outre, l’étude préconise le développement d’une véritable stratégie de ressources humaines qui permettra aux collectivités d’évaluer les besoins en main-d’œuvre et d’attirer les profils intéressants. Certaines municipalités commencent d’ailleurs à travailler dans cette optique et redonnent du sens au travail dans le service public. En termes de financement de postes locaux, l’étude recommande une stratégie nationale ou régionale pour aider les collectivités, à l’instar de ce que font les Pays-Bas (voir encadré). « Les municipalités peuvent être encouragées à développer leur propre financement, par exemple via des taxes vertes, mais il est nécessaire que l’État ou les régions mettent en œuvre un budget pour leur donner les moyens de financer les postes. Elles doivent en outre avoir la possibilité de gérer leur budget. Il existe en effet un certain nombre de barrières réglementaires », indique Mélanie Bourgeois. Autre possibilité : la mise en place d’une forme de coopération entre certaines municipalités pour financer des emplois à temps plein. Les plus grandes d’entre elles peuvent ainsi aider les plus petites et ces dernières peuvent éventuellement mettre leurs ressources en commun pour mutualiser les recrutements.
L’exemple des Pays-Bas
En Europe, les Pays-Bas sont l’un des pays les plus avancés sur la question. Très dépendants du gaz, ils souhaitent sortir rapidement de cette source d’énergie. Pour cela, les pouvoirs publics ont instauré une obligation pour les municipalités de mettre en place des plans de transition chaleur et refroidissement. Parallèlement, des moyens financiers et techniques ont été mis en place afin que chaque municipalité puisse se doter d’un coordinateur.