Stratégie
L’Occitanie convertit des autocars diesel à l’hydrogène
Le groupe Safra, spécialisé dans la décarbonation de la mobilité lourde, a rétrofité quinze véhicules appartenant à la région Occitanie. Ils devraient circuler d’ici quelques mois sur les lignes interurbaines du Tarn.
D’ici quelques mois ou semaines, quinze autocars un peu particuliers circuleront sur les routes du Tarn. Ils ne carbureront pas au diesel, mais à l’hydrogène ! Jean-Luc Gibelin, vice-président aux transports de la région Occitanie, explique : « La région réalise un budget vert depuis 2021. Nous sommes donc très conscients que le fait d’agir sur les mobilités va nous permettre de réduire notre impact carbone. L’hydrogène est l’une des solutions. » L’Occitanie s’est d’ailleurs dotée d’un plan hydrogène de 150 millions d’euros.
Pour rétrofiter les véhicules, elle a fait appel à l’entreprise albigeoise Safra, spécialisée dans la décarbonation de la mobilité lourde. « Nous avons une expertise sur la rénovation des transports en commun depuis près de 70 ans et avons également développé le segment de l’autobus urbain hydrogène depuis 2018. Vingt-trois bus Hycity (anciennement Businova H2) sont aujourd’hui en circulation en France », précise Bertrand Richard, responsable commercial de Safra.
Des tests concluants
Depuis l’été 2021, date de la signature du contrat avec la région, Safra travaille donc au rétrofitage des cars de modèle Mercedes-Benz Intouro. D’abord, les éléments thermiques – moteurs, réservoir, boîte de vitesse – ont été déposés. « Il y a deux ans, pour passer l’homologation, il n’était pas possible de changer les dimensions du véhicule, donc nous avons fait le choix d’installer les réservoirs hydrogène à l’intérieur des cars – une partie dans les soutes et une partie à l’arrière des véhicules –, ce qui condamne les deux dernières rangées, à savoir neuf places assises », développe Bertrand Richard. Aujourd’hui, les critères de l’homologation ont évolué et il est possible de changer la hauteur des cars et donc d’installer les éléments en toiture, en ne dépassant pas 80 cm.
Le kit de rétrofit est composé de six réservoirs de 350 bars (35 kg chacun), deux blocs de piles à combustible (puissance totale 100 kW) et une batterie. « Tous les tests menés dans le centre d’essais spécialisé Utac, pour entre autres démontrer la capacité des cars rétrofités à fonctionner sans perturber d’autres dispositifs électriques et électroniques à proximité, ont été concluants. » Les véhicules affichent une autonomie entre 350 et 500 km (s’il n’y a pas d’utilisation du chauffage ou de la climatisation) et se rechargent en un quart d’heure.
320 000 euros par véhicule
La transformation a coûté 320 000 euros par véhicule. « C’est peu ou prou le prix d’un autocar diesel en neuf, mais beaucoup moins cher qu’un autocar neuf hydrogène, qui serait plutôt autour de 700 000 euros [Safra a conçu des bus neufs hydrogène, et non des cars, ndlr] », poursuit Bertrand Richard. Désormais – depuis l’été 2023 –, la Région attend l’homologation (délivrée par le ministère de la Transition écologique, à travers la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer [DGITM]) pour (re)mettre les cars en service… « Ce n’est pas assez rapide au vu de l’urgence écologique ! », s’exaspère Jean-Luc Gibelin, qui estime que « l’engagement de l’État est insuffisant ».
Ce rétrofitage sur quinze véhicules est une expérimentation, que la région aimerait étendre, mais qui sera compliquée sans accompagnement financier de l’État. Des discussions sont en cours autour des stations d’avitaillement, qui devraient être installées à chaque bout de la ligne Saint-Sulpice-la-Pointe/Albi, « mais en les attendant nous ferons appel à des réserves mobiles d’hydrogène vert ».