Décryptage
L’Ademe met des chiffres sur la transition énergétique
À l’heure où certains s’interrogent sur la pertinence économique d’investir dans la transition énergétique, et notamment dans les énergies renouvelables, l’Ademe a publié une étude annuelle qui dresse un tableau prometteur dans trois secteurs : les transports, le bâtiment résidentiel et les énergies renouvelables et de récupération.
L’Ademe (agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) a publié en juillet 2019 une étude annuelle sur les « marchés et emplois concourant à la transition énergétique et écologique ». Elle porte plus précisément sur l’évolution du chiffre d’affaires et du nombre d’emplois directs équivalent temps plein (ETP) de trois secteurs (transports, le bâtiment résidentiel et les énergies renouvelables et de récupération) en France (métropole et DOM), entre 2006 et 2016, avec des estimations pour 2017. Dans l’ensemble, en dix ans, le chiffre d’affaires (trois secteurs confondus) a plus que doublé pour atteindre 81 milliards d’euros. Il devrait poursuivre sa trajectoire en 2017, malgré un ralentissement de la croissance entre 2015 et 2016 (voir graphique 1). Les emplois directs quant à eux ont connu une stagnation de 2013 à 2016, mais devraient repartir à la hausse en 2017 et s’établir à 376 620 ETP, soit une augmentation de 75 % par rapport à 2006, tous secteurs confondus.
Une progression facilitée par les politiques publiques
Une des raisons qui pourrait expliquer cette croissance, explique le document, est l’impulsion des politiques publiques en matière d’économie verte, qui portent les différents marchés. Par exemple, la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) sont deux politiques qui fixent à l’échelle nationale des objectifs en matière de réduction de la consommation d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre.
Dans le bâtiment, ces objectifs se traduisent notamment par le développement de l’efficacité énergétique, qui progresse à travers des activités telles la rénovation énergétique des bâtiments, le remplacement des appareils de chauffage et de production d’eau sanitaire et l’augmentation de la performance des appareils électroménagers.
Dans les transports, qui dans cette étude n’inclut que les transports routiers et ferroviaires ayant un impact sur la transition énergétique et écologique, l’étiquette énergie/CO2 des véhicules, obligatoire à la vente, a permis depuis 2006 d’informer les consommateurs sur leurs achats, tandis qu’à l’échelle européenne plusieurs objectifs ont été mis en place afin de réduire les émissions des véhicules particuliers neufs (normes de performance). La LTECV et les lois Grenelle I et II interviennent également en donnant un cadre stratégique pour le développement de la mobilité propre à l’échelle du pays, et la future loi d’orientation sur les mobilités pourrait y contribuer.
Focus sur le secteur des énergies renouvelables
Le marché des énergies renouvelables et de récupération (EnR&R) totalisait 26 milliards d’euros en 2017. Ce secteur regroupe, dans le cadre de l’étude, les énergies utilisées pour la production d’électricité (éolienne, solaire photovoltaïque, hydraulique, etc.), la chaleur des particuliers et la chaleur collective, les biocarburants, et le biogaz.
Globalement, le marché des EnR&R a connu un fort ralentissement en 2011, après que son chiffre d’affaires a doublé entre 2006 et 2010. Le bois-énergie (collectif et domestique), traditionnellement la plus grosse filière, a vu son chiffre d’affaires dépassé par celui de l’éolien en 2016, même s’il conserve sa première place en termes d’emplois directs ETP (graphique 2).
Les EnR électriques sont les plus importantes et représentent la moitié du chiffre d’affaires du secteur. Parmi celles-ci, l’éolien domine, grâce à un taux de raccordement en hausse constante depuis 3 ans, là où l’hydroélectricité et le photovoltaïque, les deux autres EnR électriques majeures, restent stables. L’étude prévoit une nouvelle progression de l’éolien en 2017, qui atteindrait 13 910 ETP, ainsi qu’un redressement du secteur photovoltaïque, qui pourrait connaître sa première croissance du nombre d’emplois depuis 2010 (de 4 680 ETP en 2016 à 7 270 ETP en 2017), tandis que le marché de l’hydroélectricité devrait se contracter (le nombre d’ETP stagnant à 11 700, et le chiffre d’affaires devant diminuer à 3,1 Md€, son niveau le plus bas depuis 2007).
Des balances commerciales divergentes
Les trois marchés étudiés ont des balances commerciales très contrastées. En effet, le secteur des transports est largement excédentaire (1,9 Md€) grâce à l’exportation de véhicules particuliers neufs, tandis que le secteur des bâtiments est déficitaire (1,9 Md€) à cause de l’importation d’appareils électroménagers. Les EnR&R, quant à elles, ont également, dans une moindre mesure, une balance commerciale déficitaire (0,7 Md€), à cause de la croissance de la filière éolienne (importatrice d’équipements), mais ont un chiffre d’affaires à l’export important, auquel l’éolien participe aussi. À l’avenir, il est possible que cette filière diminue ses importations en raison du développement de l’éolien en mer, plusieurs usines étant situées en France.