Portrait
Conjuguer transition énergétique et patrimoine
Philippe Moutet est responsable énergie, climat et architecture à la Fédération des parcs naturels régionaux de France. Depuis vingt ans, il défend une approche concertée de la transition énergétique pour aller vers l’autonomie tout en préservant le patrimoine.
Répartis sur l’ensemble du territoire français, les Parcs naturels régionaux (PNR) veillent à la préservation des sites les plus emblématiques de France – des volcans d’Auvergne à la Camargue, du Queyras à la Brière, des bocages aux hautes montagnes… Dans ce contexte, la prise en compte de problématiques aussi prosaïques que celles de l’énergie et du déploiement de projets solaires ou éoliens, à l’esthétique parfois discutée, peut paraître compliquée. « Pas si les projets sont concertés et représentent une opportunité de développer l’économie locale, de mobiliser les habitants ou d’améliorer le cadre de vie », répond Philippe Moutet, le monsieur Énergie du réseau de 54 parcs.
Intermédiaire privilégié
Il y a vingt ans, lorsqu’il a intégré la Fédération des PNR, en tant que chargé de mission développement économique, la question commençait seulement à émerger et suscitait plus volontiers l’inquiétude, et/ou les conflits, que l’enthousiasme. « D’un côté, les entreprises nous faisaient remonter leurs inquiétudes quant à l’évolution du coût de l’énergie. De l’autre, les territoires nous alertaient sur l’impact paysager d’infrastructures énergétiques comme les lignes à haute tension, mais aussi les premiers projets éoliens terrestres », se souvient-il. Dès les années 2000, la fédération se lance, en partenariat avec l’Ademe, dans la mise en place d’un réseau de techniciens énergie-climat. Ils sont aujourd’hui une soixantaine à accompagner tous types de projets de transition – de l’installation de bornes de recharge pour véhicules électriques à la mise en œuvre d’un réseau de chaleur alimenté au bois –, et font le lien entre les élus, les citoyens et les acteurs économiques. « Dans les communes rurales, il n’y a pas toujours une personne dédiée à ces questions. Le technicien du PNR est donc l’intermédiaire privilégié entre les différents interlocuteurs », explique-t-il.
Du conflit à la co-construction
De son côté, il a accompagné pendant vingt ans la montée en compétence des techniciens sur ces sujets, animant le réseau, proposant des formations, anticipant les évolutions. De fait, l’appropriation progressive des sujets, également par les élus locaux, a permis d’apaiser les débats. « En 2000, quand la question de l’énergie entrait dans les parcs, c’était de façon plutôt conflictuelle – pour s’opposer à un projet éolien par exemple. Aujourd’hui, on essaie de maximiser les retombées pour le territoire, d’ancrer la gouvernance à l’échelle locale, etc. », détaille Philippe Moutet. De façon pro-active, chacun des parcs a formalisé dans sa charte un positionnement sur les énergies renouvelables. Au niveau national, la fédération publie également des «.motions.» sur ces sujets. Elle estime par exemple nécessaire que « l’implication citoyenne dans les projets énergétiques et notamment éolien [ne soit pas] pas réduite à une simple participation symbolique au capital sans aucune liaison avec sa gouvernance ». En ce sens, Philippe Moutet lance un appel aux porteurs de projet.: « Pour garantir la réussite de ces initiatives, nous les appelons à venir très en amont rencontrer les équipes du parc, et à être capables de recomposer leur proposition si besoin. »
LES PARCS EN CHIFFRES
• 54 parcs naturels régionaux, une quinzaine à l’étude.
• Ils couvrent plus de 4 400 communes, soit 15 % du territoire français ;
• comprennent plus de 4 millions d’habitants ;
• emploient 2 200 agents ;
• visent l’autonomie énergétique en 2040.